Brasserie La Choulette |
Face au désastre et dans l'attente des dommages de guerre, de nombreux brasseurs cesseront toute activité ou se regrouperont pour former des coopératives ou des unions de brasseries. Le processus de concentration se met en branle. Destructions, regroupements, en 1939, on ne dénombre plus que 919 brasseries dans les deux départements, soit la moitié de moins que 25 ans plus tôt. Le vent du progrès continue de souffler sur la région : les livraisons se font en camions permettant de vendre davantage, plus loin et moins cher. Les recherches de Pasteur, la généralisation de la fermentation basse (déjà en service depuis 30 ans dans l'Est de la France) vont révolutionner la brasserie régionale mais, ces innovations coûtent cher et imposent des moyens financiers importants notamment pour l'achat de matériel de refroidissement et de soutirage (mise en bouteilles). Les plus petits n'y survivront pas. La seconde guerre mondiale apportera son triste lot de destructions et de pillages, la région étant une nouvelle fois en première ligne. Au sortir de la guerre, les brasseurs durent faire face à un autre drame. La concurrence du vin se fit de plus en plus sévère. La consommation de bière baissa de 30 %. Le vin, denrée rare pendant la guerre, avait gardé ses lettres de noblesse, il était de bonne qualité alors que la bière, de faible densité et très légère (0,5 % Vol. Alc.) ressemblait à de l'eau gazeuse parfumée au houblon. Les matières premières ont fait l'objet de restrictions jusqu'en 1950. Les brasseurs n'avaient donc pas les moyens de produire une bière de bonne qualité. Autre événement tragique pour la brasserie régionale : l'arrivée de nouvelles boissons (bières importées, soda, limonade...) qui les fragilisa encore un peu plus. En 1950, on ne compte plus que 137 brasseries. Sur le plan industriel, la concentration se poursuit : la production progresse dans de grands établissements, modernes, se livrant à une concurrence acharnée. En 1968, on dénombre 71 brasseries, 45 en 1976, 23 en 1985. De nombreux brasseurs délaissent la fabrication pour devenir dépositaires et s'installent dans les grandes villes (GBM à Roubaix, devenu aujourd'hui Terken, Pélican à Lille ou Motte-Cordonnier à Armentières). L'arrivée des supermarchés et hypermarchés mettra un terme à cette activité et aura raison des dernières brasseries familiales. Aujourd'hui, on en dénombre 28 (selon notre propre recensement). Cette reprise est due à la multiplication des micro-brasseries comme à Fourmies, Lille, Calais ou encore Saint-Pol-sur-Ternoise. Actuellement, les brasseries, toutes catégories confondues, sont disséminées sur l'ensemble de la région et affichent leur diversité. Entre la brasserie "La Choulette" à Hordain et la brasserie ultra-moderne d'Heineken à Mons-en-Baroeul, difficile d'établir un rapport. Le patrimoine culinaire de la région a survécu aux guerres, à la concurrence, à l'industrialisation et c'est sans doute cela le plus important pour les papilles des consommateurs et amoureux de cette région. Les brasseurs du Nord ont leur fierté, leur richesse et leur savoir-faire comme arguments de vente face aux multinationales de la bière pour notre plus grand bonheur. A bientôt pour de nouvelles découvertes avesnoises...
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